Mémoires d'un Veilleur

Inès contacta ensuite le commissaire qui dépêcha ses hommes au manoir. Tous s’activaient encore lorsque Merlin arriva en hélicoptère. Il avait prévenu son équipière qu’ils étaient responsables de l’enquête. Inès était en compagnie du commissaire et d’un inspecteur qui prenait sa déposition lorsqu’un homme en uniforme introduisit Merlin dans la cuisine. Le commissaire termina de prendre les dépositions avant de quitter les lieux, aussitôt suivi du médecin légiste et de la victime. Thibaut jouait dans le petit salon lorsque l’hélicoptère s’était posé dans la cour. Il avait couru jusqu’à la porte pour rejoindre le grand salon et le hall d’entrée, mais Blanche l’avait rattrapé et l’avait ramené sur le tapis où elle jouait avec lui. Dès que le calme fut revenu, Inès emmena Merlin dans la pièce où toute la famille était réunie. L’enfant fut tellement heureux de le voir, qu’il lâcha le train de bois et sauta dans ses bras en lui posant une bise sur chaque joue.
— Tu es venu ! s’exclama-t-il en se lovant davantage contre lui. Tu viens jouer avec moi ? demanda-t-il ensuite.
— Tout à l’heure, Thibaut. Tout à l’heure, on jouera à deux.
Merlin avait posé un baiser sur le front de l’enfant avant de le déposer au sol. Inès eut de la peine en voyant la déception de son fils. Elle s’accroupit pour lui murmurer quelques mots.
— Tu vas d’abord manger. Dès que Merlin et moi aurons fini notre travail, on jouera avec toi. Tu veux bien ?
— Vous travaillez ? Ah bon ! Alors on jouera après.
— Je te le promets, affirma Merlin en ébouriffant les cheveux de l’enfant.
Blanche prépara Thibaut avant de l’emmener dehors où Arthur s’occupa de lui. Dès que Thibaut fut hors de vue, les deux agents reprirent un air grave.
— Voici le capitaine Merlin, l’enquête nous a été confiée. Nous devons nous rendre au laboratoire.
— Puis-je vous accompagner ? demanda timidement Claude.
— Si vous voulez.
Claude précéda les agents jusqu’à la scène de crime. Anselm considérait son équipière et leur guide. Il était étonné qu’elle accepte qu’un tiers les accompagne.
Inès détailla les faits à son équipier. Claude acquiesçait régulièrement, apportant quelquefois des précisions sur les évènements survenus les années précédentes. Après avoir fait son rapport, elle examina la réserve, pendant qu’Anselm visitait la pièce principale. Elle découvrit un reste de livre. Il avait beaucoup souffert de l’explosion. Aucun d’eux ne parvint à déchiffrer le titre, mais Claude reconnut le livre où Marie notait toutes ses expériences. En continuant la fouille, Merlin aperçut sous un amas de verre un petit morceau de papier. D’après la couleur jaunie, il semblait provenir du fameux grimoire. Par chance, il n’était pas trop abîmé. On pouvait y lire : « 5, 250 ». Aucun d’entre eux ne savait ce que cela signifiait. Merlin protégea le lambeau de papier dans un sachet qu’il rangea dans sa poche.
— Que cherchez-vous exactement ?
— Je ne le sais pas, Claude. On ne le saura que lorsqu’on l’aura trouvé, malheureusement.
— Lucet, regarde par ici !
La lieutenante s’approcha et peina à voir ce que lui montrait son équipier. Le fil attaché au pied de la table était presque invisible à l’œil nu.
— Intéressant.
Elle remarqua alors un liquide sous le reste de la table.
— Qu’est-ce à ton avis ? demanda-t-elle en montrant sa découverte à Merlin.
— Je dirais un produit qui, mélangé à celui-là, dit-il en désignant un morceau d’étiquette, ferait un très bon explosif.
Anselm ramassa un peu du liquide à l’aide d’un morceau de verre, avant de démontrer sa théorie par l’expérience.
— Penserais-tu comme moi ? interrogea Lucet.
— Certainement. Claude, pouvez-vous nous laisser, s’il vous plaît ? J’aimerais éviter un autre accident, il y a beaucoup de produits dangereux dans cette pièce… Je vais téléphoner au commissariat et demander une autopsie du corps.
— Une autopsie ?
— Oui.
— Mais pourquoi ?
— Parce que ce n’est pas un accident ! Allez-y maintenant !